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Entretien avec Vanessa Kanga – "Avec l'Afropolitan Nomad Festival, je souhaite offrir un évènement majeur à l'Afrique"

Chanteuse d’origine camerounaise, résidant au Québec depuis l’âge de 16 ans, Vanessa Kanga souhaite briser les frontières en offrant aux artistes africains un évènement majeur sur leur continent.  C’est ainsi qu’elle a créé l’Afropolitan Nomad Festival, un Festival itinérant qui a vu sa première édition en 2012 au Cameroun. Au-delà de l’aspect musical, l’objectif est de favoriser le rapprochement Nord-Sud, l’échange interculturel et l’éducation à la musique. Un projet ambitieux et engagé qui mêle concerts, ateliers et conférences. Son édition 2017 se déroulera à Pointe-Noire du 14 au 19 août avec pour thématique “L’art et le dialogue au service de la paix”. Interview. 
Comment est née l’idée de créer le Festival Afropolitan Nomade ?
Mon parcours de chanteuse est lié à cette idée. Même si j’ai eu la possibilité d’avoir une bonne reconnaissance dans le milieu, il m’a permis de faire un constat : il y a très peu de circulation professionnelle des artistes africains vers l’occident, notamment à cause des problèmes de visa. Et au Nord, il est difficile de tourner lorsqu’on est issu de la diversité ou lorsqu’on fait de la musique du monde. Il est en effet très complexe de percer le marché musical, du fait de sa petitesse, d’une part, mais aussi parce que les locaux sont favorisés, d’autre part. Je me suis alors dit que la seule façon de briser le problème de mobilité des artistes africains c’est d’avoir un évènement majeur en Afrique. Lorsqu’on est citoyen canadien, on n’a pas de problème de mobilité pour se rendre en Afrique. En déplaçant des artistes de calibre sur le continent, cela permet d’avoir un évènement majeur sans avoir à subir les déboires des refus administratifs.
Pour vous, la musique est surtout un moyen d’engagement citoyen ?
L’art est un puissant vecteur de changement pour moi. On peut diffuser des messages de façon plus puissante. En rassemblant des artistes impliqués dans le milieu, la musique a un impact plus significatif. L’art et la culture permettent de rassembler des gens de différents horizons autour de thématiques qui sont abordées de façon ludique.
L’industrie musicale se développe en Afrique. Qu’en pensez-vous ?
Je suis consciente que l’Afrique a un fort développement culturel et que cela s’industrialise de plus en plus. C’est pour cette raison que j’ai choisi de faire un festival itinérant, tant pour les artistes du continent que pour ceux qui viennent de l’extérieur. Nous avons l’ambition de faire les grandes capitales culturelles, d’aller où ça se passe.
Organiser un Festival itinérant, n’est-ce pas plus complexe ?
C’est beaucoup de travail mais moins qu’on le pense. Nous travaillons sur un format proche des franchises. Nous sélectionnons des promoteurs en fonction de critères précis pour s’assurer qu’il est capable d’accueillir l’évènement. Nous avons conçu une trame de fond adaptable à la réalité locale. Je m’occupe du volet des partenaires internationaux et ceux sur place s’occupent de tout ce qui est local. C’est un partenariat 50/50 avec le local. Je ne veux pas réinventer le paysage artistique existant du lieu où je passe. Je veux surtout offrir la possibilité d’organiser un évènement majeur grâce au volet international.
Ce festival est-il destiné à avoir lieu un jour sur le continent européen ?
Je pense que l’Europe a suffisamment d’évènements dont on peut bénéficier. Mon but est de permettre à des villes africaines de rayonner au même titre qu’Avignon en France pour son festival par exemple. J’aimerais qu’on me dise un jour que le Mali est reconnu pour organiser le plus grand évènement de kora.  Si on a décidé de sortir de l’occident, c’est qu’il y a un besoin chez nous. Même si les budgets sont difficiles à obtenir, il y a des belles choses à voir sur le continent. L’idée c’est de marquer une ville africaine sur la carte.
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Qu’en est-il de la programmation de l’édition 2017 ? Quelles sont les têtes d’affiche ?
Nous tâchons de faire une programmation par continent et on se concentre sur la francophonie. Plus de 40 artistes se produiront provenant d’Afrique de l’Ouest, d’Europe ou d’.Amérique du Nord. Parmi ceux-ci, nous avons la chance d’avoir Freddy Massamba, un artiste largement reconnu, et qui est notre directeur artistique cette année.
Les artistes internationaux sont Badi (Belgique), Rutshelle Guillaume (Haiti), Elena Stoodley, Veeby, Emrical, Jean Gardy (Canada), Koudy, Senam Malo, Jajasu (Benin), Sadrak, Armand Biyag, Teety Tezano, Love N love, Nicole Obele (Cameroun), Ashka (Algerie),  Jocelyn Balu et les Aigles de la Révolte (RDC), Alibeta (Sénégal).
Les artistes locaux qui défendront les couleurs nationales ont pour noms : Teddy Benzo, Lorna, Etilene Kingha, Djofel, Ecoma Gospel, Brice Mizingou, Christian Ouissyka, MLG Mochristo, Ame Berlea, K Musica, Nadege, Bouitis Bouitis, Shaab Joe.
Les artistes auront aussi l’occasion d’avoir des rencontres professionnelles, de bénéficier de liens avec des programmateurs. Nous organisons également des ateliers de formation, des conférences et des débats. Sachant que l’activisme passe beaucoup par le biais de la radio en Afrique, nous avons fait venir des radios d’Afrique, de France et du Canada. En somme, nous essayons de ratisser large pour laisser une emprunte sur place.
Etes-vous satisfaite de l’évolution du Festival depuis sa création en 2012 ?
Oui, je suis satisfaite de son évolution. Chaque édition permet de créer un réseau d’artistes. Depuis 2012, j’ai mis en relation 80 artistes de tous les continents qui continuent à échanger. C’est la principale retombée dont je suis fière. Le but de ce Festival n’est pas uniquement de performer. Nous ne voulons pas de star ni de diva, mais des artistes qui souhaitent apporter quelque chose aux autres. Nous créons d’ailleurs pour chaque édition un forum de discussion avant l’arrivée sur place afin de créer un lien en amont. On fonctionne comme une famille. Cela devient aussi un réseau d’entraide. Au-delà de faire découvrir une ville africaine on crée une synergie intercontinentale qui lie les gens. Et c’est ma plus grande satisfaction.
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Il faut également souligner que la grande particularité de l’édition de cette année c’est nos liens avec les institutions internationales. Je tiens d’ailleurs à remercie l’Organisation Internationale de la Francophonie, le Bureau International Jeunesse , les Offices Jeunesses internationaux du Québec notamment, ainsi que les Instituts français. Ce sont des institutions qui nous donnent une caution morale et qui croient en la force des échanges interculturels. Je les remercie d’avoir cru en cette folie furieuse.
Finalement quels artistes africains vous ont particulièrement marqué ?
Il y a notamment Manu Dibango avec qui j’ai eu la chance de travailler, ainsi qu’Henri Dikongué et Fredy Massamba qui est une inspiration actuelle. Au niveau des femmes, je pense à Sani Yolo, Miriam Makeba, Angélique Kidjo ou Brenda Fassié. Il s’agit de femmes fortes qui ont été particulièrement impliquées et qui ont allié l’art à quelque chose d’important.
 
Par Céline Bernath
 

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