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« On ne sait jamais vraiment qui on est, on ne sait jamais vraiment qui on aime. » Et c’est la même chose pour la géographie, le lieu de départ et le lieu d’arrivée. L’interview date de 2011, sur un plateau littéraire (France 2) et Bessora explique un peu ce qui fait la complexité de cette vie. Autant le dire, c’est un fameux boxon ! De contradictions, de passions et de patiences, de cris, de silences, un pas en avant et deux sur le derrière. Bessora donc, écrivaine née en 1968 à Bruxelles, d’une maman suisse et d’un papa gabonais, ministre et qui se prénomme Saturnin. Les choses commencent ainsi. C’est elle qui le dit.
Bessora tient un site très jubilatoire où elle livre au quotidien quelques réflexions. Jamais dépourvues de bon sens et d’humour. Par exemple, on y apprend que l’écriture, il ne faut pas s’en faire une montagne. Suffit de vouloir. « Un écrivain, donc ça ne transpire pas, pas de glandes sudoripares, mais des glandes à lettres d’où les mots coulent tout seuls. On vous dira même que Stendhal pondait un livre en quinze jours. Ah, c’est si facile d’écrire un roman. » Et toc, pour toutes celles et tous ceux, nombreux, qui jouent les tourmentés.
Mais comment en est-elle arrivée là ?
Rien de plus simple, ça tient en deux lignes : « J’ai fait des études commerciales, j’ai travaillé ensuite dans des banques américaines en Suisse. J’ai tout laissé tomber pour venir faire des études d’anthropologie à Paris et écrire des romans… »
« Il lui aura fallu dix-huit mois pour arriver en Europe, il lui faudra moins de neuf heures pour repartir à son point de départ. » Alpha.
Sitôt dit, sitôt fait. Son premier titre, « 53 cm », sort en 1999, elle décroche un premier prix en 2001 pour « Les taches d’encres », enquille encore six romans et trois recueils de nouvelles avant de se retrouver dans la peau d’ « Alpha », entre Abidjan et la gare du Nord, celle de Paris, peu importe, une gare dans la vie d’un Africain. Terminale. Et c’est cet impossible trajet, de patience et de poussière qu’elle raconte. Parce qu’elle est longue, la route. Entre Gao et cette verrière ferroviaire, dans le ventre des canots, dans la main des passeurs, la misérable quête de l’ailleurs.
Allez jeter un œil sur son carnet de route, elle s’appelle Bessora.
« Cinq ou six ans, c’est toujours mieux que de pourrir ici. Peut-être que tu vas mourir avant le bout de ta route, mais si tu restes ici, tu seras mort bien plus tôt. Tu ne sais jamais ce que te réserve le voyage. Mais tu peux être sûr de ce qui t’attend si tu ne pars pas: rien. »
Alpha, de Bessora, Edit. Gallimard Jeunesse, 20 euros, 90 (papier) et 12 euros, 99 (en version numérique)
Roger Calmé
Photo DR
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