L’universitaire et fameuse militante Stella Nyanzi a été arrêtée à Kampala, ce vendredi 7 avril au soir, accusée notamment d’avoir harcelé l’épouse du président, Yoweri Museveni. Un évènement qui crée la polémique, notamment sur les limites de la liberté d’expression en Ouganda.
Deux charges ont été retenues contre Stella Nyanzi : outrage à la personne du président et à la première dame, mais aussi appel au public pour collecter des fonds pour des serviettes hygiéniques sans autorisation.
Les jeunes filles ougandaises font face à un fort taux de déscolarisation à cause de leurs difficultés à accéder à des protections hygiéniques. Durant la campagne présidentielle, la première dame, Yoweri Museveni, avait promis des distributions gratuites dans les écoles pour lutter contre ce phénomène. Une promesse sur laquelle est revenue la ministre de l’Education, faute de moyens, a-t-elle justifié.
A la suite de cela, Stella Nyanzi a lancé une campagne de levée de fonds et de distribution de serviettes hygiéniques. Une campagne en ligne virulente dans laquelle elle attaque directement Janet Museveni. Mme Nyanzi, dont le travail porte essentiellement sur la sexualité en Afrique, avait accusé la Première dame de « ne pas être du tout en phase avec la réalité du peuple ». Diplômée de l’université de Londres, cette militante utilise souvent des formulations sexuelles particulièrement imagées, qui choquent dans un pays largement conservateur.
« Elle mène sans cesse des batailles sur les réseaux sociaux qui, nous pensons, ne servent pas nos intérêts ni les siens », a déclaré ce samedi Emilian Kayima, le porte-parole de la police à Kampala lors d’une conférence de presse.
Selon des témoins, Mme Nyanzi a été arrêtée par des agents de sécurité en civil après une réunion du Rotary club à Kampala, sur l’éducation des filles. Lundi, Mme Museveni avait donné une rare interview télévisée, dans laquelle elle avait dit avoir « pardonné » l’universitaire pour ses commentaires.
Des organisations de défense des droits civiques ont fait part de leur inquiétude au sujet de ce qu’ils considèrent comme une atteinte à la liberté d’expression.
« Depuis de nombreuses années, nous avons documenté de nombreuses violations des droits des Ougandais à la libre expression, avec des radios et journaux contraints par le gouvernement de fermer, pour les punir de leur couverture critique de la manière dont le gouvernement essaie de contrôler ce qui est diffusé », a commenté Maria Burnett, chercheuse à Human rights watch (HRW). « L’arrestation et les accusations portées contre le Dr. Nyanzi sont une nouvelle indication claire que ceux qui expriment des opinions critiques sur le gouvernement peuvent subir sa colère », a-t-elle ajouté. « La manière dont Nyanzi a été arrêtée vendredi tient plus de l’intimidation que de la loi », a-t-elle repris, dénonçant une « tactique pour l’effrayer elle et sa communauté ».
Stella Nyanzi devrait comparaître devant la justice aujourd’hui.
Par C.B.